Frontex de nouveau au centre de la polémique

Frontex est à nouveau au centre de la polémique. Cette fois, la critique a été portée par la Commission européenne qui, dans un rapport, a souligné les lacunes et le comportement problématique de l’Agence. Selon une vérification interne, manque de rémunération des frais de personnel, manque de coordination, manque de connaissances, suivi insuffisant des analyses psychiatriques et psychologiques et toutes sortes de défauts qui « mettent en péril la réputation de Frontex ».

Le document décrit en 69 pages les « faiblesses » et les « incohérences » dans divers domaines de travail au sein de ce corps permanent : dans les missions, dans le recrutement d’agents, dans les évaluations psychiatriques et psychologiques, dans les processus de planification des opérations – comme l’intervention rapide aux frontières – et dans suivi de tous ses travaux. « Lors des examens médicaux psychologiques et psychiatriques, Frontex n’établit aucun critère selon lequel une personne est apte au travail ou non », lit-on dans le document, qui se plaint que parfois ces agents effectuent des tâches pour lesquelles ils ne sont pas formés.

Ces problèmes, couplés au fait que cet organe est armé, impliquent un « risque élevé » non seulement pour la réputation de l’Agence, mais aussi pour ses membres et ses citoyens. De plus, la vérification se poursuit, lorsqu’une personne est rejetée pour un poste, les raisons de ce rejet ne sont pas expliquées, il n’y a donc pas un suivi adéquat de la pratique de chaque recrue. Dans le cas d’opérations d’intervention rapide aux frontières – lorsqu’un pays demande l’aide de Frontex pour contenir des afflux massifs de personnes dans un laps de temps relativement court – les auditeurs, qui ne précisent pas les lieux couverts par l’enquête, menée au cours du premier semestre de 2022 , ils n’ont trouvé aucune preuve que l’agence ait évalué la situation avant l’intervention, ni qu’il y ait eu des plans élaborés en collaboration avec l’État membre concerné.

Les auteurs de l’étude estiment que cette « déficience » peut affecter « l’efficacité » de la gestion des frontières extérieures de l’UE. « Les États membres devraient clarifier la valeur ajoutée des policiers déployés rapidement et la manière dont ils devraient être évalués. » 41,6% des agents déclarent ne pas avoir été suffisamment informés, ou en temps utile, des missions auxquelles ils participeront, selon une enquête jointe à l’audit. Parmi les répondants, 32,4% ont même déclaré qu’ils n’avaient pas été informés du poste qu’ils auraient occupé dans les missions.

Bien qu’ayant l’un des budgets les plus importants de toutes les agences de l’UE (754 millions d’euros cette année seulement), son corps permanent est incapable de payer les dépenses de certains de ses fonctionnaires. Cinquante pour cent des répondants ont déclaré que le système de paiement ne fonctionnait pas bien, en particulier pour les week-ends et autres paiements de routine, sans préciser lesquels. Selon le document, de nombreux policiers ont même « dû payer et avancer eux-mêmes la somme ».

Selon les auditeurs, Frontex doit désormais combler toutes ces lacunes, à un moment où la pression migratoire dans l’Union européenne devient de plus en plus intense. Pour faire face à ces arrivées, Bruxelles augmente chaque année la taille (et le budget) de cet organe permanent. D’ici 2023, 7 500 policiers seront déjà présents et l’objectif est d’atteindre 10 000 policiers d’ici 2027, pour tenter de protéger les portes de l’Union de l’immigration irrégulière. Les députés de la commission du contrôle budgétaire ont également vivement critiqué Frontex.

La semaine dernière, ils ont demandé de ne pas approuver les comptes 2020 de l’agence. Par 15 voix contre 12, la commission a refusé d’octroyer la décharge pour le budget 2020 de Frontex. Dans un projet de résolution accompagnant la décision, adopté par 26 voix pour et 1 contre, les eurodéputés évoquent « l’ampleur des fautes graves et d’éventuels problèmes structurels » de l’ancien directeur exécutif de l’agence, qui a depuis démissionné à la suite des révélations contenues dans le rapport Olaf (l’Office européen de lutte antifraude) du 28 avril.

Ils se disent « choqués et profondément préoccupés par le suicide d’un membre du personnel, lié à des pratiques présumées de harcèlement sexuel » et saluent la réouverture du dossier par la nouvelle direction exécutive. Les autorités ont constaté que 17 cas de harcèlement sexuel ont été signalés au sein de l’Agence en 2020, dont 15 ont été classés sans suite. Le Parlement dans son ensemble votera sur les décisions de décharge lors de la session plénière du 2 octobre à Strasbourg, qui se tiendra sur la prochaine décision.

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