Trois enfants se sont noyés après qu’un bateau à moteur des garde-côtes tunisiens a percuté un bateau qui se dirigeait probablement vers l’Italie. La nouvelle a été donnée par Agi, qui a eu accès à quelques vidéos sur l’accident. Le drame se serait produit jeudi 10 novembre au large de Chebba, ville portuaire de Tunisie à environ 190 kilomètres de Lampedusa, l’un des points de départ de la plupart des bateaux à destination de notre pays.
Selon l’Agi, deux embarcations avec des migrants à leur bord ont été interceptées par deux patrouilleurs de la Garde nationale tunisienne. L’un des bateaux a été bloqué et les migrants ont été emmenés à bord du patrouilleur. « L’autre bateau, dans une tentative d’échapper au blocus, a été percuté par l’un des véhicules de la Garde nationale tunisienne, selon ce qu’a rapporté un témoin de l’Agi, qui est entré en possession des vidéos concernant ce qui s’est passé », écrit l’agence. D’après les images, le moment de l’impact n’est pas clair, mais les conséquences sont claires. Certaines personnes sont tombées à la mer sous les cris et le désespoir de ceux qui avaient déjà été transbordés sur le patrouilleur : « Des racistes ! Regardez, regardez, ils se noient, ils ont noyé nos frères ! », criaient certains migrants.
À la suite de l’impact, trois enfants sont tombés à l’eau et se sont noyés, dont deux jumeaux. Une fois arrivés au port, « les témoins racontent la grande solidarité des personnes à terre, qui ont aidé les rescapés, leur donnant de l’argent et accompagnant les personnes dans le besoin à l’hôpital ou aux arrêts des transports en commun. Personne n’a été arrêté par les autorités. Ceux qui ont assisté à la scène sont encore sous le choc », écrit l’Agi. L’un des témoins raconte le sentiment de honte et de douleur des enfants morts : « Les gens du port étaient bouleversés, tout le monde aidait comme si d’une manière ou d’une autre ils voulaient s’excuser au nom de notre pays ».
Fonds de l’UE et de l’Italie vers la Tunisie
La Tunisie reçoit des dizaines de millions d’euros de l’Union européenne et de l’Italie pour des programmes de coopération sur la migration, qui se traduisent en fait par le financement du fonctionnement des garde-côtes tunisiens, les mêmes accusés d’avoir percuté le bateau à Chebba. Entre 2017 et 2020, Tunis aurait dû recevoir de l’UE environ 91 millions d’euros au titre dufonds fiduciaire de l’ue. Les activités financées comprennent la lutte contre les trafiquants, la gestion des frontières et le rapatriement forcé des migrants depuis l’Europe. Toutes ces ressources n’ont pas été dépensées à cause du Covid, mais avec la reprise des flux depuis la Tunisie, l’UE définirait un nouveau plan pour assurer la continuité du programme. L’Italie a fait de même : le dernier protocole d’accord avec la Tunisie prévoit une dotation de 200 millions d’euros pour la période 2021-2023, dont 11 millions pour la coopération en matière migratoire.
Selon Forum Tunisien pour les droits économiques et sociaux, rien qu’en 2022 ce seraient plus de 500 migrants morts en mer qui auraient quitté la Tunisie. Entre septembre et octobre, au moins deux bateaux ont fait naufrage au large de Chebba, faisant des dizaines de victimes. Plus de 16 000 Tunisiens sont arrivés sur nos côtes depuis le début de l’année. Mais il faut aussi y ajouter tous ces migrants d’autres nationalités qui ont choisi des passeurs tunisiens pour tenter la traversée de la Méditerranée centrale.