L’héroïne de Netflix qui risque la prison pour avoir sauvé des vies

« Le plus gros cas de criminalisation de la solidarité en Europe ». C’est ainsi que le Parlement européen a décrit la processus en Grèce contre 24 travailleurs humanitaires et volontaires, qui risquent jusqu’à 20 ans de prison, pour avoir aidé des personnes qui se noyaient en mer.

Parmi les accusés figure la réfugiée syrienne Sarah Mardini, connue pour avoir inspiré le film « The Swimmers » sorti sur Netflix et qui raconte sa périlleuse traversée de la Méditerranée en compagnie de sa sœur Yusra, nageuse olympique. La jeune femme ne se présentera pas à l’audience car, selon son avocat, les autorités grecques l’ont empêchée de rentrer au pays. Les partisans des travailleurs humanitaires ont accroché une banderole à l’extérieur du palais de justice pour montrer leur soutien.

Le débat en plénière se déroule au tribunal de Mytilène, sur l’île de Lesbos. Les travailleurs humanitaires sont accusés de trafic d’êtres humains, de fraude, d’appartenance à une organisation criminelle et de blanchiment d’argent. Des organisations telles que Human Rights Watch et Amnesty International ont demandé l’abandon des poursuites et qualifié le procès de farce. Le juge en chef a déclaré que seules les allégations « d’espionnage » contre les accusés seraient examinées dans cette première phase, tandis que les accusations de blanchiment d’argent, de trafic de migrants et de fraude seraient traitées plus tard une fois les enquêtes terminées.

Le processus, entamé en novembre 2021 puis reporté, pourrait durer longtemps. Selon Wies de Graeve, représentant d’Amnesty International et observateur international, cette lenteur de la procédure serait une tactique des autorités grecques pour dissuader les ONG humanitaires d’opérer sur les îles grecques. Parmi les accusés figure également un banquier néerlandais à la retraite, Pieter Wittenberg, qui a déclaré que toutes les accusations portées contre eux ne tiennent pas et que ce procès a un objectif politique. Les allégations d’espionnage concernent l’utilisation d’une application de messagerie cryptée, à savoir WhatsApp.

Un cas anormal, celui de Mohammad Hanad Abdi, un réfugié somalien de 29 ans condamné à 142 ans de prison en 2021 pour « traite des êtres humains », l’appel en Grèce qui a réduit la peine de l’homme s’est retrouvé sur les bancs du tribunal à 37 ans, dont 8 à purger. Abdi avait sauvé 31 personnes lors d’une traversée meurtrière en canot pneumatique de la Turquie vers l’île grecque voisine de Lesbos. Il a déjà passé du temps en prison et travaillé pendant sa garde à vue, il sera donc libéré dans les prochains jours. Le député européen Stelios Kouloglou et les organisations humanitaires ils ont commenté la situation comme une victoire pour le mouvement de solidarité internationale.

Condamner des réfugiés à de longues peines de prison en tant que passeurs est une pratique courante en Grèce, où le gouvernement vise à empêcher davantage de réfugiés d’atteindre le pays. En Italie, ce sont généralement les gens qui conduisent les bateaux qui se retrouvent dans le collimateur des enquêteurs selon diverses ONG eux aussi seraient en fait des victimes. En effet, selon les humanitaires, les organisations qui gèrent le trafic de migrants – les véritables coupables du phénomène – restent impunies, tandis que des individus qui ont également été exploités par ces organisations sont poursuivis et qui seraient souvent des personnes au passé difficile cherchant juste pour te sauver.

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