Le festival européen d’extrême droite stoppé par 007 : « Risque d’un rassemblement néonazi »

Au final, l’indignation et la précaution l’ont emporté, et le festival d’extrême droite prévu fin août à Ypres, en Belgique, a été interdit. Outre les mouvements citoyens, les services secrets européens craignaient également que l’événement ne devienne un pôle d’attraction pour les néonazis. Cette hypothèse a été soutenue par un groupe de recherche collaborant avec le gouvernement des États-Unis. Le conseil municipal d’Ypres, qui avait autorisé l’événement en mai, a réexaminé le dossier après que le débat s’était envenimé ces derniers jours.

Invités radicaux

L’événement, connu sous le nom de « Frontnacht », devait se dérouler dans le cadre de l’IJszerwacht, la version radicale du pèlerinage de l’Yser, un rassemblement traditionnel du nationalisme flamand. Depuis 2003, l’aile la plus externe du mouvement a créé une version éclatée à une date différente, cette fois les 27 et 28 août. Comme l’a rapporté la télévision nationale belge RTBF, ces dernières années, l’IJzerwake s’est radicalisé. L’année dernière, par exemple, le néonazi Tomas Boutens, ancien militaire condamné à cinq ans de prison, était présent avec un stand de son projet Thulé, qui aspire à devenir le plus grand mouvement néofasciste de Flandre. Pour attirer plus de jeunes, l’édition de cette année comportait également des concerts de groupes « identitaires » le samedi soir, alors que le véritable rassemblement aurait dû avoir lieu le dimanche après-midi.

Parmi les invités figurait également Bronson, un groupe de punk rock romain qui affiche ses liens étroits avec l’organisation néo-fasciste italienne CasaPound, dont il arbore le drapeau sur scène lors de ses représentations. Les vidéos du groupe sont produites par Alta productions, dirigée par Davide Di Stefano, figure historique du mouvement et frère de Simone, ex-leader de Casa Pound et aujourd’hui à la tête du mouvement Exit, contre l’obligation de vacciner. . Parmi les autres invités figuraient Flatlander, nom de scène de Harm-Jan Smit, qui, selon le média d’investigation Bellingcat, s’est fait remarquer en 2020 pour avoir repris la chanson The Snow Fell, un classique de Skrewdriver écrit à la mémoire d’Adolf Hitler. .

Niveau de risque élevé

Les services de renseignement avaient averti que le festival pourrait attirer des sympathisants néonazis de toute l’Europe. « Le rapport que nous avons reçu de la police locale et du Threat Analysis Coordination Body indique que les groupes invités à se produire à la Frontnacht promeuvent des idées néo-nazies et néo-fascistes, ce qui est inacceptable pour une ville paisible comme Ypres », ont-ils déclaré au local. autorités politiques après la réunion, ajoutant qu’aucune décision ne pouvait être prise avant la réception du rapport. La décision a probablement aussi été motivée par des tensions politiques internes.

En mai dernier, l’autorisation est venue de l’administration d’Ypres, gouvernée par une coalition de libéraux, de socialistes (Vooruit) et de la N-VA, le parti séparatiste de droite flamand. Aussitôt un collectif local fait circuler une pétition pour tenter d’annuler le festival, tandis que des représentants fédéraux des socialistes vooruit menacent de quitter la coalition si le festival est autorisé. La surveillance extrême est devenue l’une des priorités de la Sûreté de l’Etat en Belgique. L’autorisation d’organiser le festival a été retirée, mais il reste à voir comment réagiront les organisateurs. Le président d’IJzerwake, Wim De Wit, avait prévenu : « La ville d’Ypres devra payer les frais déjà engagés » en cas d’annulation.

Les origines

Le pèlerinage à la Tour de l’Yser trouve ses racines en 1920, alors qu’il était une cérémonie pacifiste, mais s’est rapidement transformé en rassemblement nationaliste. Au centre de la manifestation se trouvaient les demandes d’autonomie du mouvement flamand, depuis des années culturellement et linguistiquement réprimées par l’aile francophone belge. Avant la Seconde Guerre mondiale, l’événement était soutenu et renforcé par des formations flamandes d’extrême droite. La tour de l’Yser, considérée comme un symbole de la collaboration avec l’occupant nazi, a explosé clandestinement en 1946, très probablement par des résistants, mais a été reconstruite aux frais de l’État en 1950.

Avec l’approbation de diverses réformes de l’État, qui accordent à la Flandre de plus en plus d’autonomie et de droits, le pèlerinage perd de sa vigueur, rassemblant de moins en moins de monde. L’arrivée du parti Vlaams Blok (Bloc flamand, actif de 1974 à 2004) dans le paysage politique belge a cependant ravivé la mèche identitaire, créant cependant des tensions entre les différentes tendances du nationalisme. En 2003, l’aile la plus radicale, qui gravite autour du Vlaams Belang, se détache, créant l’IJzerwake (la veillée sur l’Yser) en opposition au « pèlerinage sur l’Yser » (IJzerbedevaart), qui avait récupéré les intentions pacifistes des origines.

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