Plus de 18 000 migrants d’Égypte en 2022. Mais pour l’Italie, plus de gaz et d’armes comptent

La photo qui montre le Premier ministre Giorgia Meloni serrant la main du président égyptien Abdel Fattah al-Sisi à son arrivée à la COP27 a suscité la controverse de ceux qui se souviennent encore du meurtre de Giulio Regeni comme d’une blessure ouverte, sur les auteurs desquels il n’est jamais complètement clair a a été fait. La dirigeante italienne n’est pas la première ni ne sera la dernière des chefs d’État et de gouvernement (européens et occidentaux) à mettre de côté la question des droits de l’homme au profit de realpolitik: les liens commerciaux entre l’Italie et l’Egypte sont trop nombreux et solides, sinon stratégiques, du gaz à l’armement. Mais il y a un autre lien qui saute aux yeux en ces jours où le nouvel exécutif dirigé par le centre-droit montre ses muscles envers les dizaines de migrants secourus par les ONG : l’Égypte est devenue le premier pays d’origine des demandeurs d’asile qui débarquent sur nos rivages.

Les flux de migrants et le flop de l’UE

Selon le dernier Les données du ministère de l’Intérieur, sur les 88 100 migrants arrivés en Italie à bord de bateaux du début de l’année au 7 novembre, 18 217 se sont déclarés citoyens égyptiens. Il s’agit du groupe national le plus important parmi ceux certifiés par le ministère de l’Intérieur : près d’1 « clandestin » sur 4 a fui le pays (ou le régime si vous préférez) d’Al-Sisi, une part en forte hausse par rapport aux dernières années. Cette croissance des flux en provenance d’Egypte est un échec flagrant des politiques de coopération menées par l’UE et l’Italie avec Le Caire, coûtant des dizaines de millions d’euros.

Pourtant, celui avec l’Égypte semblait être une réussite, du moins en matière d’immigration. Selon un rapport de l’agence de l’Union européenne pour l’asile, les bateaux de migrants irréguliers ne quittent plus le pays d’Afrique du Nord. En 2016, rappelle le Manifeste, le Caire a adopté une législation très stricte contre la traite des êtres humains « qui prévoit des peines d’emprisonnement, des travaux forcés et des amendes comprises entre 200 mille et 500 mille livres égyptiennes (environ 10 mille et 25 mille euros) pour les trafiquants ». Les « bonnes intentions » d’Al-Sisi ont été bien récompensées par l’Europe, qui a alloué en 2016 60 millions d’euros pour aider les garde-côtes locaux à arrêter les bateaux. 80 millions supplémentaires arriveront dans les années à venir grâce à un accord signé en octobre. L’Italie a apporté son soutien personnel en fournissant des moyens et une assistance aux autorités égyptiennes. Le problème, cependant, est que les flux de migrants, au lieu de disparaître, ont changé de direction : d’une part vers la Turquie, et d’autre part, en plus grand nombre, vers la Libye. Dans les deux cas, les fussi avaient pour destination un pays européen en particulier : l’Italie. Les données du ministère le confirment.

Que fera le gouvernement Meloni avec Al-Sissi ? Demandera-t-il de plus grands efforts pour arrêter les contrebandiers par voie terrestre, et pas seulement ceux par voie maritime? Il rendra plus efficace l’accord de retour déjà en vigueur entre Rome et Le Caire, qui a conduit jusqu’à présent à quelques centaines de retours forcés vers l’Égypte en 4 ans, entre autres en augmentant le les doutes par le Garant des personnes privées de liberté ? Certes, en voulant mettre en œuvre ces mesures, l’Italie a des leviers sur lesquels jouer. Nous sommes le premier partenaire commercial de l’Égypte et le cinquième au niveau mondial, ainsi que le deuxième pays de destination des marchandises égyptiennes.

Affaires entre l’Italie et l’Égypte

Entre 2017 et 2021, malgré les tensions autour de l’affaire Regeni, notre industrie de guerre a continué à faire d’assez bonnes affaires avec le Caire : 28 % des armes made in Italy exportées dans le monde ont été achetées à l’Égypte, selon le rapport de Sipri. Sans oublier le business au pays des deu grandes pyramides du secteur énergétique tricolore, Eni et Snam Come ont reconstruit un dossier di Recommon, « L’Égypte est le pays où se trouve le plus grand volume des réserves de gaz d’Eni, plus de 20% du total. La production dans le pays de la principale multinationale italienne de l’énergie, détenue par l’État, représente 60% du total national « . Grâce avant tout aux projets d’Eni, affirme Recommon, « le régime d’al-Sisi a conquis un rôle de premier plan sur l’échiquier énergétique international. Ensuite, il y a Snam », le plus grand opérateur du système de transport de gaz en Europe, une société également détenue par le L’État italien, qui a acheté 25% de la East Mediterranean Gas Company (EMG), propriétaire du gazoduc Arish-Ashkelon entre Israël et l’Égypte, également connu sous le nom de Peace Pipeline », écrit Recommon.

Tous ces investissements d’infrastructures sont réalisés grâce aux établissements de crédit et aux institutions financières. Au premier rang, poursuit Recommon, « il y a Bank of Alexandria, la filiale locale du premier groupe bancaire italien, Intesa Sanpaolo. Egalement à laquelle participe l’Etat égyptien, la Banque d’Alexandrie se targue d’être le canal privilégié des investissements italiens dans des secteurs stratégiques pour l’Egypte, tout d’abord le secteur pétrolier & gazier et celui de l’achat d’armes, si « chère » au régime » . Enfin, comme garant de ces relations, « on retrouve SACE, l’assureur public italien contrôlé par le ministère de l’Economie et des Finances, dont l’exposition historique au régime égyptien dépasse les 4 milliards d’euros ». Selon Recommon, ce réseau d’affaires manque de transparence. « Il serait pour le moins souhaitable de clarifier enfin les trop nombreux aspects obscurs des relations entre l’Italie et l’Egypte, menées par nos ‘champions’ industriels et financiers », écrit l’organisation. « Si cela ne se produit pas, ce sera une nouvelle preuve que les intérêts économiques priment toujours sur la protection des droits des personnes », conclut Recommon.

4.3/5 - (22 votes)

Laisser un commentaire